À l’approche de la rentrée scolaire, une question cruciale s’impose : quelle place donner à l’intelligence artificielle (IA) dans l’éducation burkinabè ? Depuis quelques années, l’IA générative , comme ChatGPT bouleverse la manière dont le savoir est produit, diffusé et évalué. Si, ailleurs, cette révolution pédagogique est déjà engagée, elle frappe désormais à la porte de nos établissements. Faut-il s’en inquiéter ou y voir une opportunité pour transformer l’école au Burkina Faso ?
Les menaces réelles
L’IA menace surtout les approches pédagogiques traditionnelles fondées sur la mémorisation et la restitution mécanique de connaissances. Or, dans de nombreuses écoles et universités burkinabè, les évaluations reposent encore largement sur ce modèle : réciter la définition, restituer une formule, reproduire un cours. Avec l’IA, ce type d’apprentissage devient caduc : un simple prompt permet d’obtenir instantanément une réponse correcte. Cela interroge directement la validité de nos méthodes d’évaluation.
Les opportunités à saisir
Plutôt que de redouter l’IA, nous devrions l’utiliser pour renforcer les compétences qui échappent à l’automatisation :
- la pensée critique (savoir distinguer le vrai du faux, questionner les sources),
- la créativité (imaginer des solutions locales adaptées aux réalités burkinabè),
- la collaboration (travailler avec l’IA comme on le ferait avec un coéquipier),
- et la métacognition (apprendre à réfléchir sur sa propre manière d’apprendre).
Ce sont ces « compétences orientées vers l’avenir » qui permettront à nos élèves non seulement de réussir à l’école, mais aussi de s’insérer dans un monde du travail profondément transformé.
Un défi pour les enseignants
L’IA impose aussi une remise en question du rôle de l’enseignant. Former à l’usage critique et responsable des outils numériques suppose que les enseignants eux-mêmes soient formés. Cela nécessite des politiques publiques ambitieuses en matière d’éducation numérique, mais aussi des initiatives locales pour que chaque enseignant, qu’il soit en ville ou en zone rurale, puisse comprendre et accompagner ce changement.
Une responsabilité collective
Dans notre pays, l’éducation est déjà confrontée à de nombreux défis : infrastructures insuffisantes, classes surchargées, ressources pédagogiques limitées. Dans ce contexte, l’IA peut sembler une préoccupation secondaire. Pourtant, si nous ne préparons pas nos élèves à maîtriser ces technologies, nous risquons d’accentuer encore le fossé entre eux et leurs homologues d’autres pays.
Comme le propose certains chercheurs, l’IA pourrait être pensée non pas comme un simple outil, mais comme un partenaire d’apprentissage. Cela implique de considérer le travail scolaire comme un travail collaboratif où l’élève et l’IA co-produisent du savoir. Cette approche invite à revoir nos méthodes d’enseignement, nos critères d’évaluation et même notre conception du triangle pédagogique, que l’on pourrait transformer en tétraèdre, avec l’IA comme quatrième pôle.
L’intelligence artificielle n’est ni un miracle ni une menace absolue. C’est une nouvelle forme d’intelligence qui vient s’ajouter à celles que nous connaissons déjà. L’école burkinabè a le choix : subir cette révolution, ou en faire un levier pour moderniser ses pratiques pédagogiques, renforcer l’esprit critique et stimuler la créativité de ses élèves.
À l’orée de cette rentrée scolaire, Zagla Media Lab, média technologique engagé, invite à ouvrir le débat : comment intégrer l’IA dans notre système éducatif, non pas comme un danger, mais comme une chance pour préparer la jeunesse burkinabè aux défis du XXIe siècle ?
ZAGLA