De plus en plus de couples burkinabè vivent une atmosphère de méfiance, où la curiosité vire parfois à l’obsession : l’espionnage des téléphones portables. Ce phénomène, souvent motivé par la peur de l’infidélité, devient une cause récurrente de tensions, de conflits, voire de séparations.
Un phénomène en pleine expansion
Avec la généralisation des smartphones et des réseaux sociaux, les relations amoureuses sont de plus en plus exposées. Selon une enquête informelle menée par des associations de jeunes à Ouagadougou, près de 7 personnes sur 10 admettent avoir, au moins une fois, fouillé le téléphone de leur partenaire sans autorisation.
« Aujourd’hui, tout se passe dans le téléphone : messages, appels, réseaux sociaux. Certaines femmes, tout comme certains hommes, fouillent les appareils pour découvrir d’éventuelles trahisons », explique Mariama , étudiante en sociologie.
Des témoignages révélateurs
Seydou, 32 ans, raconte :
« Ma copine vérifiait constamment mes messages WhatsApp. Elle avait installé une application pour cloner mon compte. Résultat, notre relation s’est terminée, car je ne supportais plus ce manque de confiance. »
Pour Clémence, 28 ans, l’espionnage était presque une question de survie sentimentale :
« Mon fiancé avait des comportements suspects. J’ai fini par fouiller son téléphone et j’ai découvert qu’il entretenait une autre relation. Cela a provoqué une grosse dispute et nous avons rompu. »
Les conséquences psychologiques et sociales
Cet espionnage permanent entraîne un climat de suspicion et de stress dans les couples. Les disputes deviennent fréquentes et certains partenaires se sentent humiliés par ce manque de confiance.
« La confiance est le socle d’un couple. Lorsqu’on commence à fouiller le téléphone de l’autre, cela signifie qu’on a perdu confiance. Cela peut mener à la rupture », affirme un psychologue et conseiller conjugal.
La question légale : un acte illégal ?
Au Burkina Faso, l’espionnage des communications privées est considéré comme une atteinte à la vie privée. Selon le Code pénal (article 384), « quiconque intercepte, écoute ou enregistre des communications privées sans autorisation encourt des peines d’amende et d’emprisonnement. »
Une avocate le confirme :
« Fouiller un téléphone sans le consentement de son propriétaire est assimilé à une violation de la vie privée. En cas de plainte, cela peut être sanctionné par la loi, même dans un couple. »
Une affaire de confiance et de communication
Pour de nombreux experts, la meilleure solution reste le dialogue. Plutôt que d’espionner, les partenaires sont encouragés à discuter de leurs doutes et à construire une relation basée sur la confiance mutuelle.
« Si on en arrive à espionner, c’est que la communication est rompue. Un couple doit s’asseoir et parler des insécurités et des attentes de chacun », conseille Dr Kaboré.
L’espionnage des téléphones, bien que courant, reste un mauvais remède à la peur de l’infidélité. Au Burkina Faso, comme ailleurs, il détruit plus souvent qu’il ne sauve les relations. Entre confiance et intrusion, les couples ont tout intérêt à choisir le dialogue et le respect mutuel.