Le parquet du Burkina Faso a annoncé l’ouverture de poursuites judiciaires contre neuf ressortissants burkinabè, récemment rapatriés du Ghana, pour leur implication présumée dans une vaste escroquerie numérique liée au système de marketing de réseau QNET, ainsi que pour des faits d’extorsion de fonds et de traite de personnes. Cette opération illustre les défis croissants liés à la cybercriminalité transnationale exploitant les technologies digitales et les réseaux sociaux.
Parmi les 22 individus identifiés comme opérant à partir du Ghana, neuf ont été arrêtés et mis en examen pour avoir manipulé des plateformes numériques afin d’attirer et piéger des victimes burkinabè. Le procureur Blaise Bazié a indiqué que ces suspects, dont certains étaient déjà recherchés, sont actuellement en détention en attendant leur procès prévu le 17 juin 2025.
Le mode opératoire s’appuie largement sur une utilisation stratégique des réseaux sociaux et des outils numériques pour diffuser de fausses informations et photos montrant des supposées réussites à l’étranger, principalement en Europe. Ces contenus visuels, créés et partagés via des applications mobiles, servent à appâter les victimes en générant un effet de crédibilité trompeuse.
Selon la commissaire divisionnaire Mariam Forogo/Yaméogo, les escrocs créaient de faux profils numériques et exploitaient des plateformes de messagerie pour convaincre leurs proches au Burkina Faso qu’ils avaient décroché des emplois prestigieux. Ils faisaient ensuite transiter les victimes vers des complices, localisés au Ghana, par le biais de communications chiffrées, renforçant l’illusion de réseaux professionnels fiables.
Les victimes étaient sollicitées pour payer des frais administratifs numériques, comme des frais de visas et de passeports, souvent compris entre 1 et 2 millions de FCFA, versés par des transferts électroniques ou via des plateformes de paiement mobile. Ce procédé révèle l’utilisation détournée des infrastructures technologiques de transfert de fonds.
En réalité, les recrues étaient intégrées dans le système de marketing de réseau QNET, présenté comme une activité professionnelle légitime. Les refus d’y participer étaient suivis d’extorsions numériques, y compris la confiscation de téléphones portables, privant ainsi les victimes de tout moyen de communication et de recours.
Par ailleurs, les escrocs vendaient également l’illusion d’emplois rémunérés au Ghana avec des salaires attractifs, en exploitant des sites web factices et des bases de données falsifiées pour faire croire à l’authenticité des offres. Après deux semaines, les victimes devaient verser jusqu’à un million de FCFA pour des frais de logement et de formation linguistique, qui ne correspondaient à aucune prestation réelle.
L’enquête judiciaire met en lumière comment les technologies numériques sont utilisées pour orchestrer des réseaux complexes de cybercriminalité, causant des pertes financières estimées à plus de 33 millions de FCFA, ainsi que des conséquences sociales graves telles que déscolarisation, chômage et appauvrissement familial.
Le procureur Bazié souligne que les investigations technologiques se poursuivent pour identifier les autres acteurs clés, notamment ceux agissant depuis le Ghana, qui ont développé et exploité cette infrastructure criminelle.
Par ailleurs, les 13 victimes actuellement en prise en charge bénéficient d’un suivi dans un centre d’accueil, en attendant leur réintégration familiale et sociale.
Cette affaire met en exergue l’importance d’une coopération policière internationale efficace, notamment entre le Burkina Faso et le Ghana, face à la montée de la cybercriminalité transfrontalière exploitant les technologies digitales et réseaux de communication modernes.
ZAGLA