Un rapport de l’ONU lève le voile sur les arnaques en ligne et l’organisation très structurées qui se trouve derrière. Des réseaux criminels d’Asie du Sud-Est et en Afrique occidentale qui ont fait pousser des villages entiers.
Cryptomonnaies frauduleuses, faux investissements ou escroqueries sentimentales. Un rapport de l’organe de l’ONU contre la drogue et le crime (ONUDC) dresse le portrait des arnaqueurs en ligne et donne des précisions sur la vaste machinerie mise en place.
Ces personnes sont organisées en réseau notamment derrière de fausses plateformes de paiement, de pari ou d’échange de cryptomonnaies. Ils pratiquent encore le « pig butchering », une arnaque qui consiste à nouer un lien fort avec la victime jusqu’à la convaincre de faire de faux investissements au profit de l’auteur.
Ce business est tellement lucratif qu’en l’espace de trois années, l’ONUDC a constaté l’apparition de « villages » destinés à l’élaboration et à la gestion de ces arnaques. Ces centres d’arnaques sont principalement situés en Asie et en Afrique, mais s’étendent petit à petit partout dans le monde.
Un business florissant
Le trafic d’être humain ou la drogue de synthèse ne sont plus les seules activités des groupes criminels basés dans cette région. Nouvelle mine d’or de ces réseaux, les arnaques en ligne représentent un business très lucratif.
C’est d’ailleurs flagrant lorsqu’on se penche sur l’évolution de l’argent volé par ces méthodes ces dernières années. Le rapport évoque des « dizaines de milliards de dollars ». Un rapport annuel récent du FBI explique que, mondialement, 9,523,420,000,000 CFA ont été déclarés perdus en 2024 à cause des arnaques en ligne. Une augmentation de 33% par rapport à 2023 et ça ne concerne que les pertes déclarées.
De telles sommes extorquées permettent à ces organismes criminels de se développer à une tout autre échelle, comme le précise le rapport de l’ONUDC.
Les centres d’arnaques ont pris des proportions industrielles en Asie du Sud-Est, les gangs de fraudes, autrefois indépendants et dispersés, sont remplacés par des groupes criminels plus importants et consolidés qui opèrent souvent sous le couvert de parcs industriels, scientifiques et technologiques, ainsi que de casinos et d’hôtels. »
Au sein de cette galaxie d’activités illégales, l’IA joue un rôle prépondérant. L’outil permet de produire en grandes quantités du contenu voué à tromper les victimes. La génération de textes et d’images est par exemple largement utilisée. Mais l’IA peut aller plus loin en générant du deepfake ou des voix clonées, selon un autre rapport de l’ONUDC.
Des réseaux présents dans le monde entier
On trouve parmi les personnes impliquées « des blanchisseurs d’argent, des trafiquants d’êtres humains, des courtiers en données et un nombre croissant d’autres fournisseurs de services spécialisés et facilitateurs », précise le rapport. Ces individus sont passés experts dans le blanchiment de cet argent leur permettant d’accroître leurs activités en toute tranquillité.
Ces organisations se situent dans des territoires avec peu de regards sur leurs activités. Elles ont infiltré des entreprises, notamment des casinos ou des parcs d’affaires, eux-mêmes situés dans des Zones économiques spéciales (ZES) afin de s’assurer une certaine tranquillité à l’égard des autorités.
Ces réseaux disposent d’une main-d’œuvre estimée à plusieurs centaines de milliers de personnes, souvent issues du trafic d’êtres humains et employés de force. D’autres sont simplement complices de ce réseau. La plupart viennent de pays d’Asie ou d’Afrique, mais aussi d’Europe de l’Est et d’Amérique du Sud. Un personnel multilingue qui se trouve être bien utile dans le secteur de l’arnaque.
Les centres d’arnaques ne sont d’ailleurs pas seulement présents en Asie, mais tendent à s’exporter sur d’autres continents comme l’Afrique. Les réseaux criminels du sud-est de l’Asie profitent du manque de services de police et de renseignement de certains pays, voire utilise la corruption, pour s’y installer.
Le Nigeria, par exemple, est particulièrement convoité par les organisations criminelles asiatiques. En janvier 2025, ce sont près de 1.000 individus pratiquant le « pig butchering » et l’arnaque à la cryptomonnaie qui ont été arrêtés à Lagos et Abuja, dont une bonne partie venue d’Asie.
Source: BFM